Le procureur a requis mardi trois ans de camp contre les
trois jeunes femmes du groupe Pussy Riot jugées pour avoir chanté une
"prière punk" anti-Poutine dans la cathédrale du Christ-Sauveur à
Moscou, et qui ont reçu le soutien de nombreuses stars internationales de la
chanson.
Nadejda Tolokonnikova, 22 ans, Ekaterina Samoutsevitch, 29
ans, et Maria Alekhina, 24 ans, sont coupables "de hooliganisme et
d'incitation à la haine religieuse", a déclaré le procureur Alexandre
Nikiforov, dans la salle du tribunal Khamovnitcheski de Moscou.
Les trois prévenues "se sont livrées au hooliganisme,
motivées par la haine religieuse et l'hostilité aux croyants orthodoxes",
a-t-il précisé.
En détention depuis cinq mois, les trois jeunes femmes, qui
risquaient jusqu'à sept ans de camp, ont écouté avec sérénité le procureur qui
les a par ailleurs accusées de "s'être livrés à une provocation
soigneusement planifiée" et de "s'opposer au monde orthodoxe".
Le procureur a précisé qu'il demandait trois ans de camp
pour chacune, ayant pris en considération que leur casier judiciaire était
vierge et que deux d'entre elles, Nadejda Tolokonnikova et Maria Alekhina,
avaient des enfants en bas âge.
En février, les jeunes femmes du groupe Pussy Riot étaient
apparues encagoulées, avec guitares et sonorisation, dans la cathédrale du
Christ-Sauveur et avaient entonné une "prière punk" anti-Poutine
incluant des passages dénonçant le soutien de l'Eglise à l'Etat.
Jeudi, dans une première réaction à cette affaire, le
président Vladimir Poutine avait estimé qu'il n'y avait "rien de bon"
dans ce que les jeunes femmes avaient fait, mais il avait semblé plaider pour
une certaine indulgence envers elles.
"Je ne pense pas qu'elles doivent être jugées trop
sévèrement pour ce qu'elles ont fait", avait-il déclaré en marge d'une
visite aux jeux Olympiques de Londres.
La militante pour les droits de l'homme Lioudmila Alexeeva,
citée par l'agence Interfax, a estimé mardi que le réquisitoire du procureur
était "une honte, qui sera une honte pour la Russie et toute l'Eglise
orthodoxe si les prévenues ne sont pas libérées".
L'action des Pussy Riot a suscité de très vives réactions au
sein de l'Eglise orthodoxe, de nombreux prêtres et fidèles dénonçant la
profanation de la cathédrale et une attaque en règle contre l'Orthodoxie.
Le patriarche Kirill avait apporté un soutien appuyé à
Vladimir Poutine, élu président le 4 mars, malgré une vague de contestation
sans précédent de son régime depuis son arrivée au pouvoir en 2000.
L'Eglise orthodoxe connaît une renaissance depuis la
disparition de l'URSS en 1991. Près de 70% de la population russe se déclare
orthodoxe, même si le nombre des pratiquants réguliers n'excède pas 5 à 7%,
selon divers sondages.
De nombreuses personnalités russes et étrangères ont pris la
défense des Pussy Riot, jugeant les poursuites à leur encontre et leur maintien
en détention disproportionnés avec les faits reprochés.